Dig Oil, l’Etat congolais sacrifié au profit de la fraternité Kazadi – Mwamba ?

Présenté comme une société sud-africaine, Dig Oil, bien qu’enregistrée en Afrique du Sud, appartient à un congolais qui a fait ses débuts dans les affaires sous le Maréchal Mobutu, Nozi Mwamba.

Réputé pour ses contacts dans les hautes sphères politiques en Afrique et en Amérique du sud, Nozi Mwamba a réussi très facilement à s’infiltrer dans l’entourage du chef de l’Etat congolais, Félix Tshisekedi. Cependant Nozi Mwamba traîne beaucoup de casseroles. L’homme est connu pour la fabrication des monnaies étrangères. Il a un passé judiciaire assez chargé. En 2010, il a été condamné par un tribunal de Bruxelles à six ans de prison pour son implication dans un réseau de fabrication des faux billets de 20 dinars bahreïnis en Argentine, pour une valeur de 322 millions d’euros.

Opposé en justice à l’Etat congolais, depuis une dizaine d’année, dans une affaire de passation de marché d’exploitation de pétrole dans le Lac Albert, où Kabila a préféré attribuer le marché à son ami et proche, l’homme d’affaire juif Dan Gertler, Nozi Mwamba attendait une opportunité pour rebondir sous le nouveau régime.

Depuis 2019, Nozi Mwamba a entrepris des contacts infructueux avec la présidence de la République congolaise, par l’intermédiaire de plusieurs conseillers de Félix Tshisekedi, pour négocier un accord avec l’Etat. Cependant, en avril 2021, les affaires ont pris une autre tournure avec la nomination de Nicolas Kazadi, l’ex-ambassadeur itinérant du chef de l’Etat, au poste des finances

A la présidence de la République on se rappelle que l’ex-ambassadeur itinérant était très impliqué dans le plaidoyer pour une solution négociée avec Nozi Mwamba afin que ce dernier bénéficie d’une façon ou d’une autre de 617 millions de dollars à titre d’indemnité lui octroyée par le tribunal d’arbitrage de Paris en 2018.

Le hic dans cette affaire est que Nicholas Kazadi est un neveu de l’homme d’affaire Nozi Mwamba. En effet, Nozi est le cousin germain du père de Nicolas Kazadi, Jacques Kazadi, décédé en 2020 après une longue carrière universitaire puis politique dans le Mouvement populaire de la révolution de Mobutu Sese Seko. Vivant depuis plusieurs décennies à Johannesburg, Nozi Mwamba entretient aussi des bonnes relations avec les Tshisekedi et surtout celui devenu président. D’ailleurs, à chaque fois qu’il vient à Kinshasa, si l’occasion le lui permet, il rencontre le président congolais Félix Tshisekedi. Donc c’est la tournure prise dans cette affaire sous Kazadi et Tshisekedi qui inquiète.

Pour la petite histoire, tout commence en décembre 2007 lorsque la RDC, par la Congolaise des Hydrocarbures, et la société Divine Inspiration Group (PTY) Ltd (DIGOil ) de Nozi Mwamba concluent un contrat de partage de production (CPP) de ressources en hydrocarbures portant sur les blocs 8, 23 et 24 de la Cuvette Centrale ainsi que le CPP portant sur le bloc 1 du Graben Albertine. Cependant ces deux contrats de partage de production n’avaient pas été approuvés par le président Kabila qui va attribuer bloc 1 du Graben Albertine à Caprikat et Foxwhep, deux sociétés fondées par Dan Gertler. Estimant que la RDC avait manqué à ses engagements, la société DIGOil a engagé une procédure d’arbitrage de Paris.

En novembre 2018, la RDC est condamnée par Tribunal arbitral à payer à la société DIGOil la somme de 617 400 178 USD à horizon de 20 ans majoré de 2% ainsi que de supporter l’intégralité des frais de l’Arbitrage fixés par la Cour à la somme de 691 437 EUR, et les frais exposés par la société DIGOil pour sa défense à hauteur de 1 109 933,62 USD.

Ne s’avouant pas vaincu, la RDC, représentée par son ministre de la justice sortant de l’époque, Alexis Tambwe Mwamba, va porter l’affaire en appel. Cependant, en janvier 2020, la Cour d’appel va confirmer la décision de la première instance.

Mais ce qui soulève les questions sur la relation entre Nozi Mwamba et le ministre des Finances congolais est la série de négligences coupables dans la gestion du dossier judiciaire depuis l’arrivée aux affaires de Nicholas Kazadi.

Il faut tout de suite reconnaître que ces négligences ne commencent pas avec l’arrivée de Nicholas Kazadi, bien qu’elles prennent des proportions excessives. Alors qu’à l’époque, pour ce qui est du bloc 1 du lac Albert, le premier ministre Adolphe Muzito avait accepté une compensation entre le bonus payé par Dig Oil sur ce permis et d’autres obligations fiscales sur d’autres permis de la Cuvette centrale. Mais personne n’explique ce que cet accord est devenu à ce jour. Et comment l’affaire a fini devant le tribunal d’arbitrage. Qui pis est, la partie congolaise qui n’a pas été en mesure de produire les documents qui auraient pu battre en brèche la position de Dig Oil devant le tribunal d’arbitrage de Paris.

Curieusement, Nozi Mwamba porte cette affaire devant la juridiction américaine, avec en main, la condamnation de Paris. Contre toute attente, la RDC est absente à l’audience. Les analystes disent qu’il y avait un effort visible et une volonté manifeste de se faire condamner par défaut. L’affaire fait des bruits, le ministre, neveu de Nozi Mwamba est soupçonné de jouer le jeu. Et pour faire taire la polémique, la RDC fait appel de la décision américaine. Mais de quelle façon? De la compétence de l’avocat aux actes de procédure, tout semble avoir été mis en place pour que Nozi Mwamba se fasse payer gracieusement son argent. Lire le dossier Escroquerie d’Etat ? 619 millions USD jetés par négligence coupable au profit de Nozi Mwamba.

AUTRES ARTICLES DU GRAND DOSSIER DIP OIL

Escroquerie d’Etat ? 619 millions USD jetés par négligence coupable au profit de Nozi Mwamba

Décision de la Cour de district de Colombia (Washington) dans l’affaire DipOil c. RDC

Décision de la chambre de commerce internation de Paris de 2018 dans l’affaire DipOil c. RDC

Décision de la Cour d’appel de Paris de janvier 2020 dans l’affaire DipOil c. RDC

Dig Oil, l’Etat congolais sacrifié au profit de la fraternité Kazadi – Mwamba ?

DIG Oil vs RDC, les zones d’ombre sur la condamnation de l’Etat congolais par le tribunal d’arbitrage de Paris

DIG Oil, un rêve à la saoudienne tourné en cauchemar

S Gayala

En savoir plus sur cfinances.info

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Poursuivre la lecture