Ukraine-Russie : l’huile de palme frappée par la guerre

Image iStock : Les travailleurs d’une plantation se préparent à décharger des régimes de fruits de palmier à huile fraîchement récoltés à un point de collecte.

Dans le but de lutter contre la hausse des prix intérieurs, l’Indonésie a annoncé ce 22 avril 2022 l’interdiction d’exportation d’huile de palme. Cette mesure intervient alors que l’approvisionnement alimentaire mondial souffre des récoltes insuffisantes, de perturbations des exportations dues à la guerre en Ukraine et de pénuries de main-d’œuvre causées par le COVID-19. Elle suscite des inquiétudes sur les prix mondiaux des denrées alimentaires.

L’Indonésie étant le premier producteur d’huile de palme, cette décision provoquera à coup sûr un choc sur l’approvisionnement en huile végétale. La Malaisie et les autres pays pourront profiter de la hausse des prix mais pourront difficilement compenser le choc, ce qui pourrait entrainer une pénurie mondiale avec un impact sur les prix des denrées alimentaires, note les experts. Il y aura une pression supplémentaire sur les prix pour les ménages à l’échelle mondiale et le danger est que cela conduise encore à plus de pauvreté car l’inflation alimentaire mondiale pourrait réduire la consommation des ménages pauvres. 

Diverses utilisations de l’huile de palme

L’huile de palme représente près de 60 % des expéditions mondiales d’huile végétale. Elle est utilisée dans différents produits : l’huile de cuisson, les gâteaux et les graisses de friture aux cosmétiques, le chocolat, les biocarburants, les produits de nettoyage, et les produits comme le shampoing.  Elle est également utilisée comme matière première pour le biodiesel. L’Indonésie et la Malaisie ont rendu obligatoire le mélange de biodiesel avec une certaine quantité d’huile de palme – 30% et 20% respectivement. Il y a un mois, ils avaient déclaré qu’elles restaient attachées à cette obligation malgré la hausse des prix.

Conséquence sur le plan mondial

Alors que les principales huiles comestibles sont déjà rares suite à des conditions météorologiques défavorables et de la guerre en Ukraine, cette décision exercera une pression supplémentaire sur les consommateurs sensibles en Asie et en Afrique, touchés par la hausse des prix du carburant et des denrées alimentaires. Les consommateurs mondiaux d’huile comestible n’auront d’autre choix que de payer le gros prix pour leurs approvisionnements alors que les prix des huiles végétales ont déjà connu une augmentation de plus de 50 % au cours de ces six derniers mois.

Selon les experts, la souffrance risque de s’aggraver car le plus grand producteur d’huile de palme au monde interdit les exportations de produits de base utilisés dans les aliments, les cosmétiques et les produits de nettoyage. Il est donc possible que les prix des huiles comestibles telles que l’huile de soja, l’huile de tournesol et l’huile de colza soient aussi revus à la hausse. Cette interdiction constitue un choc pour les importateurs car ils avaient misé sur l’huile de palme pour combler le déficit d’approvisionnement. Les grands importateurs comme l’Inde, le Bangladesh et le Pakistan tenteront d’augmenter leurs achats en Malaisie mais cela ne pourra combler le vide.

L’huile de palme et l’Afrique

Cette décision peut constituer une occasion de la réflexion sur la contribution de l’Afrique à l’approvisionnement mondial en huile de palme qui est passée de 77 % en 1961 à moins de 4 % en 2014, alors que la récolte a explosé en Malaisie et en Indonésie. En même temps, la consommation d’huiles comestibles a presque triplé. A ce jour, il y a encore des pays du bassin du Congo qui rêvent de remonter leur niveau de production. Le Cameroun par exemple cherche à doubler sa production d’huile de palme et le Gabon ambitionne de devenir un exportateur de premier plan.  En RD Congo, les données montrent que la consommation intérieure d’huile de palme s’élevait à environ 415 000 tonnes métriques en 2021, une augmentation d’environ 5 % par rapport à 2019. Une famille congolaise de cinq personnes consomme 100 grammes d’huile de palme par jour, estime Fews Net, le Réseau des systèmes d’alerte précoce contre la famine.

Sha Nzovu

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