La transparence budgétaire pose toujours problème, en dépit du départ de Kabila

Le 25 juin 2021 le gouvernement américain publiait son rapport sur la transparence fiscale. Ce rapport concluait que 74 des 141 gouvernements étudiés satisfaisaient aux exigences minimales de transparence fiscale. Parmi les élèves avec mention « excellent » figuraient l’Afrique du Sud, le Burkina Faso, le Ghana, l’ile Maurice, la Namibie et l’Ouganda. Le Nigeria et la Gambie, ont satisfait aux exigences minimales en 2021 après un échec en 2020. Le département d’État estimait que les pays suivants avaient fait des progrès significatifs : L’Angola, le Burundi, la RDC, Sao Tomé-et-Principe, le Soudan et la Somalie.
La transparence budgétaire contribue à renforcer la confiance des marchés privés et est indispensable à la viabilité économique. Elle favorise une plus grande responsabilisation du gouvernement en offrant aux citoyens une certaine visibilité sur les budgets gouvernementaux, en les aidant à demander des comptes à leurs dirigeants et en facilitant un débat public mieux informé. Mais le problème avec ce rapport est que malheureusement il ne tient pas compte de la corruption et par ricochet du risque d’enfumage par certains pays voulant forcément donner une image positive à l’oncle Sam. Le rapport lui-même affirmait qu’il n’évalue pas la corruption et tenait à donner la précision suivante : le constat qu’un gouvernement « ne satisfait pas aux exigences minimales de transparence fiscale » ne signifie pas nécessairement qu’il y a une corruption importante au sein du gouvernement. De même, une conclusion selon laquelle un gouvernement « satisfait aux exigences minimales en matière de transparence fiscale » ne reflète pas nécessairement un faible niveau de corruption.

Quelles sont les exigences minimales de transparence fiscale ?

Le département d’État souligne que pour que les pays satisfassent aux exigences minimales, les gouvernements doivent rendre les documents budgétaires clés accessibles au public dans un délai raisonnable. Ils doivent être substantiellement complets et généralement fiables. Les gouvernements doivent également suivre un processus transparent pour l’attribution des contrats gouvernementaux pour l’extraction des ressources naturelles.

Selon le département d’état, les informations budgétaires doivent être :

• Accessibles au public : les documents budgétaires, y compris la proposition de budget de l’exécutif, le budget adopté et le rapport de fin d’année, doivent être largement et facilement accessibles au grand public (bureaux ou les bibliothèques du gouvernement, publications gouvernementales largement disponibles ou dans les médias de masse). Les documents budgétaires doivent être diffusés dans un délai raisonnable. Un « délai raisonnable » correspond généralement à : au moins un mois avant le début de l’exercice et avant l’approbation du budget par le législateur pour le projet de budget de l’exécutif ; dans les trois mois suivant la promulgation du budget promulgué, et ; dans les 12 mois suivant la clôture de l’exercice pour le rapport de fin d’année. Les informations sur les obligations de la dette publique devraient également être accessibles au public. Le budget édicté et le rapport de fin d’année doivent être disponibles en ligne. De plus, les informations sur les titres de créance doivent être accessibles au public et mises à jour au moins une fois par an. À compter de cette période d’examen, si un gouvernement dispose d’un fonds souverain, il doit divulguer sa source de financement et son approche générale des retraits des fonds.

• Essentiellement complet : les documents budgétaires accessibles au public doivent fournir une image substantiellement complète des dépenses et des flux de revenus prévus par le gouvernement, y compris les revenus des ressources naturelles. Les budgets doivent inclure les dépenses ventilées par ministère et les revenus ventilés par source et type. Les documents budgétaires doivent détailler les allocations et les revenus des entreprises publiques. Dans le cas contraire, ces informations devraient être disponibles dans d’autres documents publics. Les grandes entreprises publiques importantes devraient avoir des états financiers vérifiés accessibles au public. Un budget publié qui n’inclut pas d’importantes ressources en espèces ou non, y compris l’aide étrangère, ne serait pas considéré comme substantiellement complet. Les documents budgétaires doivent inclure tous les comptes ou fonds spéciaux. S’il existe des comptes hors budget qui ont un objectif légitime, ils doivent être audités, les résultats rendus publics et les comptes soumis à un contrôle. Les documents budgétaires doivent également inclure les dépenses pour soutenir les bureaux exécutifs ou les familles royales lorsque ces dépenses représentent une dépense budgétaire importante. Le processus d’examen reconnaît que les budgets militaires et du renseignement ne sont souvent pas accessibles au public pour des raisons de sécurité nationale. Cependant, les budgets militaires et du renseignement devraient être approuvés par le parlement et soumis à un contrôle civil. À partir de cette période d’examen, la dette de toutes les grandes entreprises publiques doit être divulguée.

• Fiable : les documents budgétaires et les données connexes sont considérés comme fiables si les informations qu’ils contiennent sont crédibles, ce qui signifie que les recettes et les dépenses réelles du gouvernement correspondent au budget promulgué. Le gouvernement devrait examiner l’exécution du budget tout au long de l’année, par exemple en produisant des rapports d’exécution du budget mensuels ou trimestriels. Les écarts importants par rapport aux recettes et dépenses prévues doivent être expliqués dans les documents budgétaires supplémentaires et rendus publics en temps opportun. Les états financiers doivent être préparés selon des principes internationalement reconnus qui produisent des états cohérents et comparables. Le budget exécuté doit être vérifié par une institution supérieure de contrôle indépendante. Les résultats de ces audits, y compris un résumé analytique avec les conclusions ou les recommandations de l’institution supérieure de contrôle, doivent être rendus publics dans un délai raisonnable (généralement dans les 12 mois suivant la diffusion du rapport de fin d’année). Avec cette période d’examen, le gouvernement doit disposer d’une institution supérieure de contrôle qui respecte les normes internationales d’indépendance et vérifie les états financiers annuels du gouvernement. Les procédures de passation de marchés et d’octroi de licences pour l’extraction des ressources naturelles devraient être :

• Transparent : les critères et procédures pour la passation de marchés et l’octroi de licences d’extraction de ressources naturelles devraient être accessibles au public et codifiés dans la loi ou la réglementation. Ces lois et règlements doivent être suivis dans la pratique. Les paramètres de base des concessions et des contrats devraient être rendus publics après la décision. Ces informations doivent inclure la zone géographique couverte par le contrat ou la licence, la ressource en cours de développement, la durée du contrat et l’entreprise à laquelle le contrat ou la licence est attribué.

A la lumière du rapport de la cours de compte que C finances a pu consulter, il nous semble que la RDC est loin de satisfaire réellement ces exigences. La rédaction de C finances promet de revenir sur chaque critère avec des détails. Il convient de noter que le rapport spécifiait déjà que même si la RDC avait fait des progrès il y avait encore beaucoup d’écueils. Elle n’avait pas rendu public son rapport de fin d’année. Les informations sur la dette des grandes entreprises d’État n’étaient pas accessibles au public.  Les documents budgétaires manquaient de détails sur les allocations et les revenus des entreprises d’État, qui n’avaient pas d’états financiers vérifiés publiquement.  Le gouvernement tenait des comptes spéciaux qui n’étaient pas soumis à une surveillance ou à un audit adéquat.  La fiabilité des informations concernant les dépenses destinées à soutenir les services administratifs a été mise en doute.  Le contrôle civil des budgets de l’armée et des services de renseignement semblait insuffisant.  L’exécution du budget s’était considérablement écartée du budget adopté, bien que le gouvernement ait publié un budget révisé.  Le fonds souverain du pays avait fait l’objet d’un audit indépendant mais ne divulgue pas entièrement sa source de financement et son approche générale des retraits.

Sha Nzovu

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