Transition écologique : Quel coût humain pour extraire le cobalt, l’uranium et les autres minerais ?

Depuis un certain temps, l’on voit la transition écologique prendre forme est vie. Cette dernière, planifiée vers la mobilité électrique est indispensable pour réduire les émissions de CO2. Elle se fait au prix d’une augmentation phénoménale de la demande pour les minerais présents dans les batteries, notamment le cobalt, extrait essentiellement en République démocratique du Congo. Mais quel en est le prix à payer ?

La demande de cobalt est en plein boom. Ce minerai est un élément essentiel dans la production des batteries lithium-ion qu’on trouve dans tous nos appareils électroniques, comme les smartphones et les ordinateurs.

Il est également un élément-clé de la transition énergétique puisqu’on le retrouve aussi bien dans les voitures électriques que dans les installations de stockage d’énergie nécessaires au développement de l’éolien et du solaire.

La plupart des mines de cobalt se trouvent en République démocratique du Congo (RDC), qui concentre environ les deux tiers des réserves mondiales de cobalt. Mais comme c’est le cas pour les autres incroyables richesses minérales du Congo, la population n’en tire que peu des bénéfices. Loin de profiter de ces richesses, elle doit subir d’importants dégâts sociaux et environnementaux.

Primauté du sous-sol sur le sol

L’exploitation des minerais se traduit en effet par une pollution des eaux dont dépendent les populations locales, au prix de leur santé. Les paysans voient les champs qu’ils cultivaient passer sous la coupe des sociétés minières, dans un pays où le sous-sol a la primauté sur le sol.

L’extraction minière est en outre un secteur intensif en capital, mais qui est déconnecté du reste de l’économie et qui génère peu d’emplois formels.

Les emplois formels dans le secteur ne se comptent que par milliers, alors que les personnes vivant directement ou indirectement de l’exploitation artisanale se comptent par millions.

Ces creuseurs artisanaux ne disposent pas de système de protection juridique. Ils n’ont souvent pas accès à des équipements de protection adéquats et les accidents sont fréquents.

Sous-payés, en bout de chaîne, par les multinationales chinoises ou occidentales qui exportent ce précieux minerai, ils ne tirent qu’un maigre revenu de leur labeur. En outre, plusieurs cas de travail des enfants dans les mines de cobalt ont été dénoncés.

Il faut ajouter à cela, la guerre qui sévit entre le mouvement terroriste du M23 et les Fardc dans la partie Est du pays. Guerre qui profite à des géants industriels !

Extraction sécurisé du cobalt

Documentés depuis des années par plusieurs ONG, comme Amnesty International ou Human Rights Watch, ces abus ont débouché sur différentes initiatives. Il existe notamment l’ITIE (initiative pour la transparence dans le secteur extractif), qui vise à garantir des normes de gouvernance.

Une Initiative pour des minerais durables (IDM), portée par une coalition d’entreprises, d’organisations de la société civile et de gouvernements, tente de promouvoir le respect des droits humains dans l’extraction du cobalt et d’autres minéraux.

Aucune de ces initiatives n’a toutefois force de loi. Pour cette raison, il est indispensable que les pays où siègent les principales multinationales actives dans le négoce du minerai leur imposent un devoir de vigilance.

La directive actuellement négociée au niveau de l’Union européenne en est le meilleur exemple. Même si les multinationales concernées, comme Glencore (Suisse), China Molybdenum ou Huayou Cobalt (Chine), ne tombent pas directement sous le coup de la législation, celle-ci pourrait avoir un impact.

En effet, il est possible que la directive exige des entreprises européennes qu’elles veillent à ce que leurs propres opérations respectent les normes de diligence raisonnable, même si elles s’approvisionnent auprès de fournisseurs non-européens.

Celles qui sont d’importants acheteurs de cobalt, comme les grandes marques automobiles, pourraient donc être tenues responsables de ne pas avoir mis en œuvre une vigilance adéquate.

En outre, la directive européenne pourrait inciter d’autres gouvernements à mettre en place des réglementations similaires dans d’autres régions du monde. Il en découlerait une plus grande responsabilité des entreprises dans l’ensemble de la filière du cobalt.

L’imposition de normes plus contraignantes à tous les acteurs du secteur semble encore une route longue et semée d’embûches. Ce n’est pourtant qu’à ce prix que la transition écologique pourra être rendue moins injuste pour les mineurs qui se tuent à en extraire le matériau brut.

Ol's Kakenge

Journaliste, Ecrivain-Poète et Dramaturge Congolais

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