RDC : retour sur la sulfureuse épopée ‘‘vraie – fausse’’ vente de l’immeuble BCDC !     

L’épopée de la ‘‘vraie – fausse’’ vente du siège social d’Equity Bcdc s’est terminée comme elle avait commencé: dans un flou artistique, une prestidigitation juridique la plus infâme, la plus renversante et la plus troublante.  On se croirait effectivement dans une république bananière, où l’art et  les règles classiques du droit ne signifient pas grande chose. Mais cfinances.info, seul organe avoir investigué sur cette affaire au point d’en recevoir des menaces de mort obligeant l’Union nationale de la presse du Congo (Unpc) à nous conseiller un break, peut  se réjouir d’avoir contribué à la mise en échec total d’une affaire qui allait vraisemblablement rester dans les annales comme la plus grotesque escroquerie de la troisième république contre… un privé. 

Signe visible de cette triste réalité est justement le communiqué de la haute cour

Le dernier  signe visible  de cette triste réalité est justement le dernier communiqué de la cour constitutionnelle portant annulation de la vente de l’immeuble abritant le siège social de la banque commerciale Equity BCDC sur le Boulevard du 30 juin.  « La Cour constitutionnelle a aussi rendu son arrêt relatif à une requête de Equity Bank. Il s’agit du dossier concernant la vente d’immeuble opposant Equity bank à Madame Caroline Bemba. Le tribunal de commerce s’était prononcé contre Equity qui s’était sentie lésée. La Cour, siégeant en matière de contrôle de constitutionnalité, après avis du procureur général s’est déclarée compétente et a dit la requête recevable. La Cour donc  » Déclare la décision sous rôle 069/AERH1976 du 5 août 20222 rendu par le Tribunal de commerce de Kinshasa/Gombe contraire à la Constitution et partant nulle et de nul effet. Déclare la vente subséquente de l’immeuble couvert par le certificat d’enregistrement volume AL369, folio151 portant le numéro cadastral 4856 de la commune de la Gombe et abritant le siège social de la requérante inexistante« , avait tranché la Cour dans un arrêt rendu public par le Président de la haute juridiction Dieudonné Kamuleta, en image ci – dessous.

Et la presse RD – congolaise en avait fait leur chou gras, le relayant sans esprit critique, au grand dam de l’opinion publique nationale contrainte de se ramollir le cerveau par cette ignominie.   Or, il était clairement dit qu’il s’agissait « d’un dossier concernant la vente de l’immeuble opposant Equity Bank et Caroline Bemba »,  alors que  le communiqué  de cette  instance sanctionnant l’acquisition de la dite bâtisse par la société Sodico – Sarl parlait plutôt… de Jean – Pierre Bemba Gombe et consorts.

La confusion dans cette affaire serait venue à la suite de l’usage du concept ‘‘consorts »

Il en est de même pour celui du 26 mai 2022 du tribunal du commerce annonçant la vente publique de l’immeuble querellé.  On y lit : « le tribunal du commerce de Kinshasa / Gombe porte à la connaissance du public que dans le cadre des décisions de justice  rendues respectivement par ce dernier, siégeant en matière d’adjudication au premier degré sous le RAE 069/AE RH 1976 ; En cause : Monsieur Bemba Gombo Jean – Pierre et consorts contre la société Equity bank Banque commerciale du Congo, en sigle, Equity BCDC SA ». La différence entre les deux communiqués est donc très nette, au sujet de l’identité de la demanderesse.

Pour beaucoup, la confusion dans cette affaire serait venue à la suite de l’usage du concept ‘‘consorts », qui vient après la conjonction de coordination précédant le nom de Bemba Gombo Jean – Pierre, donnant ainsi l’impression qu’il s’agirait d’une affaire qui concernerait la fratrie Bemba.  Ce qui n’est pas le cas.

Car, vérification faite par cfinances.info au sein du greffe du tribunal du commerce de Kinshasa/Gombe et confirmée par les avocats de la partie Equity Bank BCDC, le nom de Caroline Bemba ne se trouve nulle part dans cette affaire dont l’origine remonte à la cour pénale internationale avant d’être statuée par la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage d’OHADA (CCJA) à Abidjan.

Le casus belli a été le fait que Western Union, partenaire de la BCDC, ait livré les secrets bancaires de Jean – Pierre Bemba à la Cour pénale internationale (CPI)-  en lien à la subornation des témoins dont s’était rendu coupable ce dernier dans l’affaire  relative aux crimes qu’auraient commis ses hommes en République centrafricaine. Les complices de Bemba Gombo ici étaient des gens comme Aimé Kilolo Musamba, Jean-Jacques Mangenda Kabongo, Fidèle Babala Wandu ainsi que Narcisse Arido. Point donc de Caroline Bemba dont parle le fameux arrêt de la haute cour !

La cour constitutionnelle peut statuer sur une décision d’une instance supranationale ?

 Devant la fameuse CCJA, Bemba obtint la condamnation de Western Union pour divulgation de ses transactions. Cependant, ledit arrêt n’a jamais été publié par les services compétents de cette juridiction. On ne le retrouve pas non plus sur son site officiel, ce qui est contraire au principe sacro – saint de publicité des décisions de justice et laisse planer les doutes quant à l’existence même dudit arrêt. Mais votre journal s’était entendu dire  au niveau du greffe du tribunal du commerce : « la décision de la cour d’arbitrage d’Abidjan a été authentifiée » ! Mais devrait – on  le croire uniquement sur parole ?

Cependant dans cette affaire, le rôle du tribunal du commerce de Kinshasa /Gombe ne  se limitait qu’à l’exécution de ladite sentence, précise une source au sein de cette instance, sous couvert de l’anonymat. En clair, il agissant comme un greffe dans cette affaire déjà statuée par cette institution judiciaire supra – nationale qu’est le tribunal de l’Ohada. Ce qui a été faite, avec une audience d’adjudication dont la date a été malheureusement ramenée presqu’incognito le 05 aout, permettant à la société visiblement choisie d’avance de se retrouver seule dans la salle d’audience et remporter la mise. Une pratique irrespectueuse  des règles de la concurrence en matière de vente aux enchères,  dénoncée d’ailleurs par un homme d’affaire sud – africain intéressé, qui avait promis de porter plainte au niveau international  pour avoir été ainsi floué. Un autre problème : la société Sadico – sarl,  qui s’était tapée l’immeuble  à 31 millions d’euros contre sa valeur réelle estimée à 75 millions de dollars américains, était un monstre. Introuvable sur la liste d’entreprise enregistrée au niveau du registre du commerce, moins encore à l’extérieur du pays.  

La première tentative, qui a échoué, de la partie Equity BCDC d’empêcher l’exécution de cette décision était devant la cour de cassation ; celle devant la cour constitutionnelle est donc la deuxième.   La question qui se pose maintenant est celle de savoir si cette cour est réellement compétente pour connaitre une telle affaire.  Quand on sait que l’article 20 du traité de l’Ohada consacre on ne plus clairement l’impérium supranational de sa cour en ces termes : «  Les arrêts de la Cour commune de justice et d’arbitrage ont l’autorité de la chose jugée et la force exécutoire. Ils reçoivent sur le territoire de chacun des Etats parties une exécution forcée dans les mêmes conditions que les décisions juridiques nationales. Dans une même affaire, aucune décision contraire à un arrêt de la Cour commune de justice et d’arbitrage ne peut faire l’objet d’une exécution forcée sur le territoire d’un Etat partie. »  Que par ailleurs, l’article 225 de la constitution de la RD – Congo  accorde une autorité  supérieure  des traités régulièrement conclus, à l’instar de celui de l’Ohada, sur celles de nos lois.  

Les décisions de justice ne peuvent pas être attaquées devant la haute cour, selon la loi

Il faut dire que la loi  ne cite pas les décisions de justice parmi les actes pouvant être attaqués en inconstitutionnalité devant la Cour constitutionnelle. Or, pour la deuxième fois,  la Cour  a rendu une décision d’annulation d’une décision de justice pour inconstitutionnalité. Lors de la première fois, cette Cour avait annulé la décision du Conseil d’Etat, réhabilitant ainsi César Limbaya au poste du Gouverneur de la Mongala. « Il s’agit clairement d’une brèche que la cour s’est créée, bien sûr en violation de la constitution, en vue d’appliquer certaines décisions émanant directement de l’exécutif national, pour le cas d’espèce jusque – là, du président de la république », expliquait le professeur Augustin Mampuya à la presse.

Il se trouve que cette affaire était mal vécue par la kenya Equity Bank laquelle, depuis décembre 2020, avait fusionné avec la RD – congolaise, BCDC.  Une après cette opération, soit en janvier 2022, cette nouvelle banque avait déjà connu une croissance de 47% de son bilan qui est passé de 2,6 milliards USD à 3,7 milliards USD. Sa profitabilité avant impôt en 2021 s’élevait à 49,6 millions USD contre 7,6 millions USD en 2020 et, après l’impôt, à 40,2 millions USD 4,4 millions USD en 2020. Donc, sa contribution au trésor public en 2021 s’élève à 9,4 millions USD. Avec un portefeuille client de plus de 1.300.000 comptes, on estime que l’Equity – BCDC a le plus vaste réseau de services financiers en RD-Congo avec ses 65 agences à travers la RD-Congo, 12 agences dédiées western union, 214 guichets automatiques, 13 guichets avancés, 32 Master Agents et plus de 7.400 agents bancaires. Une aubaine donc pour les kenyens dont il faut à tout prix profiter.

Le président du Kenya, William Ruto et son homologue congolais, Félix Tshisekedi

 Selon des sources, Equity Bank était contrôlée en majorité par l’ancien président, Uhuru Kenyatta. Entre ce dernier et son successeur William Ruto, la relation a toujours été au beau fixe. Vice – président de son  prédécesseur, l’actuel président du Kenya le lui rendit, en le nommant facilitateur de la communauté des pays de l’afrique de l’est pour le conflit qui déchire la partie – orientale de la RD – Congo. Un poste stratégique qui permet à l’intéressé de garder contact avec les autorités de Kinshasa, pour le bien des investissements kenyans au pays de Lumumba.

Mais il est curieux de constater qu’au soir du même jour après cette entrevue…

Le 21 novembre 2022, l’actuel président du Kenya était à Kinshasa, où il a rencontré son homologue congolais, Félix Tshisekedi. Au – delà de l’agenda officiel, le dossier de l’immeuble BCDC n’était – il pas (aussi) au menu de leurs entretiens ?   Mais il est curieux de constater qu’au soir du même jour après cette entrevue,  la cour constitutionnelle publia un communiqué annonçant sa décision d’annulation de la vente de l’immeuble querellé. De là à croire à un arrangement entre les deux dirigeants sur ce dossier, il n’y a… qu’un pas.  Entretemps, plus de 11 millions de dollars viennent de disparaitre des coffres de l’Equity Bcdc. Votre journal promet de s’y pencher, à travers une (autre) enquête éclairante.

Lire aussi, en cliquant sur chacun des titres :   

Immeuble BCDC : de la corruption originelle à la collusion, au grand dam d’Equity Bank !

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Papy Mumputu

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