RD-Congo : un programme CLAIR-OBSCUR de développement des 145 territoires
Lancé le 9 octobre 2021 par le Premier ministre Jean-Michel Sama Lukonde, le Programme de développement à la base de 145 territoires de la RD Congo continue de susciter des interrogations sur sa mise en œuvre. Au moment où tous les programmes du gouvernement gérés directement par la présidence ont abouti aux mêmes résultats, à savoir : fiasco ! Le présent programme présentant la même structure de pilotage, ne subira-t-il pas le même sort ?
Contenu du programme
Dans un document bien élaboré (PADL-145T), comme le Congo en a l’habitude, dont la rédaction cFinances.info s’est procurée, l’intention d’investir dans le développement à la base est bien décrite. Les dix millions USD prévus par territoire seront consacrés aux travaux suivants : (1) réhabilitation et entretien des routes de desserte agricole et des ouvrages d’arts, (2) construction des minicentrales solaires (photovoltaïques), (3) éclairage public des axes principaux du territoire avec des lampadaires solaires sur 1 Km, (4) construction de Forage + pompe solaire intégrée et captage, ainsi que les aménagements des sources d’eau, (5) construction des marchés avec espace à vivre, (6) construction des bâtiments administratifs dans les chefs-lieux des territoires et des secteurs, (7) construction de dix logements pour le staff dirigeant du territoire, (8) structuration et professionnalisation des producteurs locaux, (9) acquisition des équipements de production et de transformation, (10) acquisition des intrants agricoles (semences, engrais, etc.), (11) construction, réhabilitation et équipement des centres de santé, (12) construction, réhabilitation et équipement des écoles.
L’impact global, attendu en 2023 est la réduction de la pauvreté et des inégalités dans les zones rurales et périurbaines. Quant à son financement, il sied de relever qu’il est reparti sur trois exercices budgétaires à hauteur de : 300 millions USD pour 2021 (sic !), 700 millions USD pour 2022 (le gouvernement parle finalement de 450 millions débloqués !) et 660,1 millions USD pour 2023. Le plan prévoit une mobilisation de la contribution des partenaires au développement, mais sans les citer et expliquer leur implication.
COMPOSANTES | Coût en USD | % |
Composante 1 : Infrastructures socio-économiques de base | 1 168 636 205 | 70,0 |
Composante 2 : Économie rurale et chaines de valeur | 290 000 000 | 17 |
Composante 3 : Renforcement des capacités locales | 4 940 000 | 0,3 |
Composante 4 : Système géo référencé pour le suivi-évaluation | 5 540 000 | 0,33 |
Total des composantes (1+2+3+4) | 1 469 116 205 | 88% |
Exécution et gestion fiduciaire & coordination | 117 529 296 | 7% |
Coordination, Suivi & Évaluation et communication | 14 691 162 | 1% |
Frais des Agences d’exécution | 102 838 134 | 6% |
Imprévus* (5% total programme) | 73 455 810 | 5% |
Total programme | 1 660 101 312 | 100% |
Problème de gestion et de pilotage
Le pilotage politique du programme sera assuré directement par le Président de la République, le pilotage stratégique sous l’autorité directe du Premier Ministre, la coordination opérationnelle sous le Ministre du Plan et le suivi technique par les Ministères sectoriels. Le document lui-même évoque déjà, parmi tant d’autres risques, la lourdeur dans l’exécution et les interférences des acteurs impliqués.
Les mêmes causes produisant les mêmes effets, plusieurs analystes prévoient déjà l’échec de ce programme tant que son gouvernail sera sous la responsabilité directe de la Présidence de la République. Irresponsable devant la représentation nationale, les membres du cabinet présidentiel, comme leur patron lui-même, ayant toujours tiré profit de la situation, au grand dam de la poipulation, le bénéficiaire final du projet.
Notons que l’exécution physique du programme sera néanmoins confiée au Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD), le Bureau Central de Coordination (BCECO) et la Cellule d’exécution des Financements en faveur des États fragiles (CFEF_ Ministère des Finances). Deux de ces 3 agences sont sous le pilotage directe du gouvernement.
Problème de répartition budgétaire !
Sur les 1,6 Milliard consacrés au programme, 1,16 (70%) est alloué aux infrastructures socio-économiques, 17% à l’économie rurale et chaine de valeur, et 0,3% seulement aux renforcements des capacités. De l’avis de plusieurs experts, ce faible pourcentage du renforcement des capacités confirme le peu d’attentions que le gouvernement accorde au processus de décentralisation, depuis la promulgation l’adoption de la constitution de 2006. Alors que l’idéal est de doter les acteurs locaux des outils nécessaires et à même de susciter un vrai esprit de développement à la base, lequel manque cruellement au pays surtout au niveau des acteurs étatiques en vue d’une meileure refondation de l’Etat congolais.
Un processus « top-down » !
Les experts consultés par cfinances.info estiment que ce programme a été conçu à Kinshasa par un groupe de gens et cela, sans vraiment l’implication de la base concernée. Le document parle d’une mise en œuvre basée sur l’approche territoriale, articulation programmatique avec les Plans provinciaux de Développement sans préciser sur l’existence des plans provinciaux et, surtout, actualisés. Le document affirme en même temps que pour chaque résultat attendu il y aura soit des études préliminaires ou actualisation des études (études de démarrage, études d’identification) et des identifications des besoins sans trop préciser le temps de démarrage. Pour le cas de la construction des écoles par exemple, il est prévu le « Recensement des études techniques disponibles au niveau provincial », mais quand ? Pour euxdonc, il y a beaucoup à redire sur la réalisation de ce programme planifié pour 2021-2022-2023 alors qu’il a été publié en décembre 2021.
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