RD-Congo : Expropriation des banques commerciales, un modèle qui évolue de Kabila à Fatshi !
Joseph Kabila a-t-il instauré un système de pouvoir, mieux de puissance… où de destruction-contrôle du système bancaire local est une des règles ? Ou c’est, Pascal Kinduelo, ce magnat des finances, qui, sous Kabila, a inauguré une nouvelle ère politique en RD-Congo avec comme dogme : contrôle des banques commerciales par le pouvoir au profit d’un clan familial ?
La RD-Congo n’a jamais connu un tel engouement des politiques à vouloir posséder – pour leur propre compte – des banques privées, comme depuis Joseph Kabila à ce jour. Les chefs de l’Etat qui se sont succédés ou leurs entourages les plus proches n’ont pas hésité à prendre le contrôle des banques commerciales dans ce pays où pouvoir, corruption et blanchiment d’argent vont ensemble comme des triplets dans un scénario digne d’une maffia institutionnelle.
Contrôle à la douceur !
Pour dater le début du nouveau phénomène jusque-là inconnu dans le milieu politique rd-congolais, il faut remonter à l’année 2013.
Au sortir des élections de 2011-2012, le clan Kabila a presque vu le pouvoir leur échapper face à une opposition conduite par Etienne Tshisekedi, le père de l’autre Tshisekedi aujourd’hui au pouvoir. Les Kabila prirent sur eux l’idée d’enfouir leurs avoirs dans une banque qui leur appartiendrait. C’est ainsi qu’ils auraient jeté leur dévolu sur la Banque commerciale du Congo (BCDC).
Le clan Kabila et leurs alliés vont d’abord faire une offre d’achat des parts à l’actionnaire majoritaire de la BCDC, le belge George Forrest. 50 millions USD sont déposés sur sa table en 2013. De revers de la main, le belge rejette l’offre.
Les raisons avancées par ce dernier , selon les sources consultées par cfinances.info, semblent parfois contradictoires. Tantôt, on rapporte que l’homme d’affaire Belge aurait agi ainsi parce qu’il aurait jugé le montant de l’offre insuffisant; tantôt parce qu’il a estimé qu’il était impossible de vérifier la légitimité de la source des fonds ; ou encore, l’homme d’affaire belge avait la certitude qu’une partie de ces fonds avait été détournée des coffres du gouvernement… Ce qui est certain, Forrest avait rejeté l’offre de 50 millions USD présenté par le clan Kabila. .
L’ère du modèle « Kwanza Capital »
Après la première tentative avortée, la Kabilie (nom donné au régime des « kabila ») change de formule. En juin 2014, elle fait appel à un magnat des banques, Sir Pascal Kinduelo. Cet homme d’affaires rd-congolais n’est pas un étranger dans la cour de Joseph Kabila. Il est ancien patron de la Banque Internationale de crédit – BIC-, vendue depuis 2008 aux proches de Kabila, les hommes d’affaires Israéliens Beny Steinmetz et Dan Gertler, qui avaient pris le soin de rebaptiser l’institution en devenant FBNBank.
Kinduela invente donc le nouveau modèle d’appropriation des banques commerciales par les politiques : création d’une « institution financière spécialisée ». Ainsi naitra « Kwanza Capital », qui aura pour patron, sur papier, Pascal Kinduelo, alors que le vrai boss est Francis Selemani, frère de Joseph Kabila et ex-célèbre directeur général de la BGFI Bank RDC.
Kwanza Capital est l’unique société rd-congolaise qui a ce statut d’« institution financière spécialisée », exclusivement réservé aux « établissements de crédit auxquels l’État a confié une mission d‘intérêt public », en vertu de la loi.
La formule mise en place par Kinduelo, à travers Kwanza Capital, est studieuse, intentionnellement imbriquée et complexe pour un amateur de comprendre. En 2015, il lance la deuxième tentative de prise de contrôle de la BCDC qui s’échelonne en plusieurs phases.
Première phase : l’État rd-congolais, possédant des parts dans la banque, arrive à obtenir que Pascal Kinduelo soit désigné comme président du conseil d’administration de la BCDC. Le ver est sagement placé dans le fruit.
Deuxième phase : Kwanza Capital obtient, par une formule tout autant complexe, d’une société domiciliée en Suisse, Quantum Global, une offre d’un prêt d’environ 80 millions USD afin de financer l’acquisition des parts de la famille Forrest dans la BCDC.
Mais lorsqu’on gratte un tout petit peu pour savoir ce qu’est cette société, le triangle est établi. En effet, Quantum Global est dirigée par le Suisso-Angolais Jean-Claude Bastos, qui gère la majeure partie des 5 milliards USD du Fonds souverain angolais. Ce fonds a pour patron José Filomeno dos Santos, le fils du feu président angolais José Eduardo dos Santos.
La Kwanza Capital fait jouer la BCC
Dès sa création, en parallèle avec la stratégie d’appropriation la BCDC, Kwanza Capital veut aussi engloutir la BIAC. Elle opère d’abord par la voie de la BGFI Bank RD Congo, contrôlée par Selemani, qui présente une offre d’achat à la Banque Internationale pour l’Afrique au Congo (BIAC). Là aussi, la famille indienne propriétaire, les Blattner, considère l’offre trop basse.
C’est là que né la stratégie de faire intervenir la Banque Centrale du Congo (BCC) qui a pour objectif de faire coulisser la proie qu’on veut engloutir avant de l’avaler sans peine. La BIAC est en difficulté. En juin 2015, la BCC lance un audit sur la BIAC, puis, en février 2016, elle suspend l’accès de l’établissement à une ligne de crédit, ce qui aggrave singulièrement ses difficultés… la stratégie. Bingo, en mai 2016, elle prend finalement le contrôle de la BIAC et lui cherche un repreneur.
Pendant que la BCC s’apprête liquider BIAC, une société chinoise, la China Taihe Bank of Congo (CTBC), fait son apparition dans le ciel rd-congolais. Quelques semaines après, fin septembre 2016, elle a l’autorisation de la BCC d’opérer en tant que banque. Et selon Wang Renguo, le président de la société chinoise, sa compagnie est venue en soutien à la Kwanza Capital.
Au lendemain, de sa déclaration, Wang rencontre le gouverneur de la BCC et offre d’acquérir la BIAC.
On peut aussi voir dans le lot la création par Kwanza Capital d’une nouvelle banque commerciale, baptisée « Alliance Bank », qui sera autorisée à opérer comme banque commerciale très vite avec toujours l’intention de phagocyter des banques.
Malheureusement, l’élan de Kwanza Capital est freiné net par les sanctions du Département du Trésor américain contre des responsables rd-congolais, dont les caciques du pouvoir. Kwanza Capital est affectée. Car, les banques étrangères, qui savent ceux qui sont réellement derrière Kwanza Capital, ne veulent plus être impliquées dans leurs mésaventures.
Belote et rebelote
A peine au pouvoir, le régime Tshisekedi n’a pas réfléchi deux fois avant de mettre en place son équipe. On y trouve des anciens banquiers, des politiciens et proches de l’ex -président. La BCC, au service de ladite équipe, asphyxie des institutions bancaires que l’on veut phagocyter, mais cette fois-ci le complot saute aux yeux. Est-ce que c’est parce que les gens sont plus avertis ou parce que les protagonistes sont amateurs ? C’est la question… L’avenir nous le dira.
2 commentaires sur “RD-Congo : Expropriation des banques commerciales, un modèle qui évolue de Kabila à Fatshi !”
Les commentaires sont fermés.