Immeuble BCDC : de la corruption originelle à la collusion, au grand dam d’Equity Bank !
Pauvre elle, cette banque kenyane. Son mal est d’avoir fusionné avec la La Banque commerciale du Congo (BCDC). Dès le départ de cette affaire, la rédaction de cfinances.info a fait de la question de la vente de l’immeuble de l’EquityBcdc son sujet d’enquête. Elle est un exemple parfait de la collision sous le régime Tshisekedi entre pouvoir politique, pouvoir judiciaire, entreprises (publiques ou privées), etc., avec des ramifications au-delà des frontières rd congolaises.
Remontons ici le péché originel. Casus belli: le fait que Western Union, partenaire de la BCDC, ait livré les secrets bancaires de Jean – Pierre Bemba à la Cour pénale internationale (CPI)- en lien à la subornation des témoins dont s’était rendu coupable ce dernier dans l’affaire relative aux crimes qu’auraient commis ses hommes en République centrafricaine.
Whisky et Mike, pour flouer la CPI
En effet, alors qu’il était dans les geôles de la CPI, Bemba ne pouvait se douter qu’il était mis sur écoute. Et lors de ses conversations avec ses complices, dont Aimé Kilolo Musamba, Jean-Jacques Mangenda Kabongo, Fidèle Babala Wandu ainsi que Narcisse Arido, au cours desquelles ils auraient préparé son opération de subornation des témoins, il faisait référence à Western Union sous le nom de code « whisky » et « Mike » pour MoneyGram. Mais la CPI ne s’en doutait de rien.
Tout bascule, en octobre 2015, lorsqu’un agent anonyme de Western Union va déposer un rapport auprès des autorités américaines. Selon le document du FinCEN (voir l’extrait ci-dessous) l’agent avait lu dans les nouvelles que Bemba et quatre autres personnes étaient soupçonnés d’avoir soudoyé des témoins dans l’affaire des crimes de guerre. Et après enquête, Western Union a identifié des centaines de transactions liées à Bemba et à ses associés, totalisant plus de 400.000 USD et ayant lieu dans au moins 15 pays.
Selon le document que cfinances.info a pu consulter, Western Union a rapporté, par exemple que Jean-Jacques Mangenda avait envoyé plus de 100.000 USD à 92 destinataires via des agences aux Pays-Bas, en République du Congo, en Grèce et ailleurs entre 2005 et 2013. Le calendrier des paiements comprenait la période présumée de subornation des témoins.
Fidèle Babala, quant à lui, a envoyé plus de 200.000 USD dans plus de 100 transactions entre 2006 et 2013. Narcisse Arido, à qui on reprochait d’avoir attiré des témoins centrafricains dans l’espoir d’obtenir l’asile, a envoyé des paiements à trois personnes au Cameroun et en France, il s’agit d’Arlette Josiane Tongui Bengue, Louis Kotys et Sylvie Ngo Manding.
Le deal des ex-détenus
Les révélations de l’agent de Western Union auraient suscité des ambitions pécuniaires auprès de Bemba et compagnie, raconte-t-on. Le hasard a placé dans les mêmes cellules de la CPI où se trouvait JP Bemba, un ancien président de la Côte d’Ivoire, acquitté et qui négociait avec son successeur son retour dans la vie politique de son pays. Il se fait que le tribunal devant lequel Bemba va ester contre Western Union pour divulgation de ses transaction est la fameuse Cour Commune de Justice et d’Arbitrage d’OHADA (CCJA), installée à Abidjan.
Comme une lettre à la poste, la décision condamnant Wester Union passe. Sans preuve probante, plusieurs sources parlent d’une main politique ivoirienne derrière cette décision. Ainsi, le tribunal entrepris une longue tournée à travers les pays d’Afrique pour d’abord certifier les comptes de Western Union.
Arrivée à Kinshasa à la BCDC, qui était en partenariat avec cette entreprise de transfert, les administrateurs, par inadvertance ou incompétence, voire complicité de leurs conseillers juridiques, commirent l’irréparable : ils cachèrent les avoirs de Western Union. Une fois démasquée, la BCDC, en application d’une disposition en vigueur dans tous les Etats régis par l’OHADA, fut-elle condamnée au paiement de 12 millions USD à Bemba et sa cohorte.
A l’époque de faits, Joseph Kabila est encore aux affaires. Son rêve le plus immédiat est d’empêcher Jean-Pierre Bemba, dont la relaxation était devenue certaine, de briguer la magistrature suprême, ce qui serait cauchemardesque pour lui. Au regard de l’animosité et de la rancune entre les deux, Bemba n’a pas pu à faire exécuter ce jugement. Mais dans l’entre-temps, Joseph Kabila aux termes des élections du 2018, va passer tranquillement le relais à Félix Tshisekedi.
Et Bemba s’ouvrit à l’Ivoirien Laurent Gbagbo qui s’offrit d’en parler à Fatshi…
Se souvenant, entre autres, de cette créance politique bloquée par le prédécesseur de Felix Tshisekedi, Bemba aurait été motivé à abandonner l’opposition et d’attendre tranquillement, malgré les invectives des pro-Tshisekedi, de se faire payer. A la présidence, les avis sont partagés. Certains ne croient pas vraiment à la fidélité de l’ex-rebelles à l’Union Sacrée, regroupement politique mis en place par Tshisekedi, bien que JP Bemba y a envoyé certains de ses lieutenant les plus compétents. Le paiement traine.
Et Bemba aurait, à nouveau, fait intervenir son co-locataire de la prison de La Haye qui en parla à Félix Tshisekedi. C’était lors de son séjour de quelques jours à Kinshasa. Quelques mois après son retour en Côte d’Ivoire, l’affaire est débloquée. Les médias s’enflammèrent en apprenant tout d’abord que le nouvel allié était en train d’exiger à l’Etat congolais le paiement de plusieurs millions de dollars américains pour ses avions séquestrés. Qu’ensuite, il vient de gagner l’immeuble de la BCDC. De sorte à déduire de la vente aux enchères dont la date est fixée au 26 juin 2022, ses 12 millions USD de dommages et intérêts.
L’affaire fit grand bruit. A son corps défendant et craignant pour sa clientèle, la nouvelle banque Equity – BCDC tenta de sauver la face. Mais de quelle manière ? « Nous ne comprenons pas que notre client en soit, dans cette affaire, réduit au rang de simples spectateurs ; en tout cas, je peux vous assurer qu’Equity BCDC est poliment tenue à l’écart », nous confiait un avocat de l’institution financière née de la fusion, sous couvert de l’anonymat. Cependant, toutes les tentatives de cfinances.info d’entrer en contact avec le directeur général et de son assistance pour vérifier cette information se révélèrent vaines. Les deux personnalités n’ayant répondu à aucun de nos courriers et messages.
A l’un des avocats de la BCDC qui accepta de répondre à nos questions, il se rebiffa par téléphone au jour convenu, prétextant être en audience.
Mais ce qui semblait être une stratégie pour ne pas avoir à faire face à la presse, vaille que vaille mise dans la moule de mendiants, se révéla être plutôt quelque chose d’assez sournois. Au fait, une manœuvre dilatoire aux fins de la réalisation, en toute quiétude, de ce qui convient de considérer comme un véritable complot. Contre la nouvelle partenaire EquityBcdc Bank, l’Etat congolais et les soumissionnaires autres que ceux qui ont facilité… ce jeu.
Ce que découvre cfinances.info est monstrueux. Si la présidence avait donc finalement accepté la vente aux enchères, l’acquéreur n’était pas à chercher… loin. Les dirigeants de la partie Bcdc, le tribunal de commerce ainsi que certains protagonistes dans cette affaire devaient certainement le savoir…
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